Marie José Lavie


<le voyage d’Italie>
“oeuvres sur papier”

 

du 9 au 28 janvier 2006

 from 9 to 28 january 2006

 

 

Marie José Lavie vit et travaille à Paris
2006     La Capitale Galerie, Paris (oeuvres sur papier)

Le voyage d´Italie

“Je dis Venise et aussitôt, dans la vacance du mot, éclatent des couleurs et des feux d´artifice, Turner, Renoir, Monet, Signac, une ville de papillotements et d´éclats, une ville carnavalesque et croustillante, dorée et cuite à point d´un midi sempiternel.

Il existe pourtant une Venise plus secrète, éloignée, silencieuse et crépusculaire, qui ne se laisse guère saisir. C´est celle de Music et de ses dessins à la plume, celle de Whistler et de ses gravures. C´est dans cette seconde lignée que s´inscrit la Venise de Marie José Lavie.

Venise des ombres et des brouillards, Venise de pluie tenace et de passants furtifs, c´est la Venise des Papiers d´Aspern de Henry James. C´est la ville d´industries et non des plaisirs, des Moulins Stuckys et des grues de la Giudecca, des visages dérobés derrière les grillages de fenêtres dans les calli étroites, des campielli déserts, des petits ponts qui font le gros dos.

Cette Venise-là, c´est aussi celle du quai des Zattere, qui borde un canal large comme un bras de mer et amplement dessiné, alors que le Grand Canal est étroit et sinueux. Dans son axe vers l´ouest, se glissant sous le pont de métal de Porto Marghera dont il adopte peu à peu la courbure, le soleil s´enfonce chaque soir, plongeant sous les fumées noires des raffineries.

Ville noire, eaux noires, ciels noirs : par en bas cependant l´eau bouge sans arrêt, pour prolonger le moindre éclat, et vers le haut, le ciel s´éclaire.

Permanence, précarité. Le Pont de l´Accademia détruit pendant la guerre, a été reconstruit en bois, de ce provisoire qui dure en se dégradant sans fin. Marie José a préféré fixer l´image du Pont du Rédempteur qui, une fois par an, en souvenir de la guérison de la peste, le troisième dimanche de juillet et pour un jour seulement, alors qu´il est solide comme un ouvrage du Génie militaire, relie les deux rives.

Pour fixer cet univers urbain de transivité, d´éphémérité, de noirceur, il fallait un médium très particulier, qui lui aussi, comme le Pont de bois, n´est franchi qu´une fois et qui ne ressert plus. Un médium capable aussi de faire ressortir la gamme des noirs, et la labilité des frottis : le monotype, si rare et si précieux, était trouvé.

Il est aux fumées, aux suies, aux charbons, aux voilettes obscures qui se posent sur la peau de la cité ce que le pastel – autre médium privilégié de Marie José, est aux couleurs, transitoire et pulvérulent, triomphant par sa légèreté et sa vulnérabilité mêmes”. Jean Clair